Mes sources :ACHICOURT Regards sur le passé.
Par Marie-Thérèse NISON-LECOINTE (1977)
Une anecdote : Le tabac à Achicourt chez la femme.
"Vers le commencement du XIXème siècle la grande majorité des Achicouriennes poussaient la ressemblance avec les hommes jusqu'à fumer la pipe."
Vers 1850, l'industrie de la dentelle périclite à Achicourt et entraîne dans sa chute la pipe des femmes.
Le culte de la pipe chez l'Achicourienne avais pris naissance parmi les dentellières qui, pour charmer les loisirs des fériés (soirées d'hiver) se plaisaient à en culotter les pipes.
On relève en 1912 comme restées fidèles au culte de la pipe :
- Julie Dumetz, femme Beaulieux,
- Juliette Candat, femme Delattre,
- Flore Houplain, femme Delattre (dite Saint-Quinton),
- Marie-Barbe Dehay, femme Dhé.
Ci-contre, une Achicourienne... en tenue sobre, bonnet de toile ou en batiste même en nansouk, la passe est tuyautée parfois en plusieurs rangs garnie de brides, très souvent la croix en or tenue par un ruban.
L'école de dentelles tenue par Mlle Adrienne Brant, reçu le prix « Prime d'honneur » de 30 F, pour le travail remarquable et le fini du travail. La plus jeune élève avait quatre ans ! C'était l'époque où la dentelle figurait dans la toilette, dans le luxe de l'ameublement qui déjà au début du XIVème siècle avait fait naître l'industrie de la tapisserie de haute lisse.
De même aux siècles précédents, la dentelle était très demandée, c'est sans doute ce qui explique la propagation de cet art dans les couvents. Les frivolités vestimentaires du temps firent le bonheur des petites mains des villages, ce qui explique l'école de dentelle d'Achicourt.
Car la dentelle d'Arras était aussi réputée que celle de Lille, Valenciennes et Bruges, aussi fine et aussi jolie dans le travail. Malheureusement, après ces heures de gloire, vint la décadence : les taxes devinrent trop élevées et de par là, le fil trop cher.
C'est surtout à la fin du règne de Louis XIV, que la région était dans un tel abandon que l'artisanat s'éteignit lentement... mais, rêvez, rêvez, petites dentellières, en croisant vos fuseaux et, lorsque vos petits doigts de fée seront las de tisser ce fil que vous aimez, partez donc rejoindre dans vos songes dorés vos aïeules tant et tant regrettées.
La dentellière et son carreau que ses doigts
agiles animent les fuseaux
La dentellière qui travaillait tard pour accomplir sa tâche, avait près d'elle, sur un pied de chèvre (tabouret) soit une petite lampe dite , « pigeon » ou encore, une boule de verre remplie d'eau de pluie, faisant office de loupe concentrant les rayons de la lumière en les orientant directement sur le carreau, faute de boule on utilisait une fiole plate couramment servant comme bouteille à liquide - et paraît-il, plus l'eau de pluie était vieille, plus la lumière limpide, pure ! ...
Il nous est agréable de lire un résultat de concours en 1880, ou Achicourt est à l'honneur par ses dentellières à savoir Mesdames Flore Legrand et Adélaïde Fourmaux. Cent deux pièces furent présentées au concours, ouvrages rivalisant de goût, de finesse et régularité.
En 1806, on évalue à 4 500 le nombre de dentellières dans la ville d'Arras et Achicourt une bonne quarantaine. Cette dentelle s'est toujours faite aux fuseaux. On se sert pour cela d'un carreau qui se compose d'une petite planchette carrée ou ovale rembourrée de façon à former un coussin. La dentellière pose souvent le carreau sur les genoux, pose idéale pour le travail, et suivre le tracet du parchemin portant le dessin de la dentelle. Le dessin, en terme technique, « la fleur », se fait en entrelaçant au fil du réseau, un fil particulier beaucoup plus gros qui doit suivre les contours du dessin tracé sur le parchemin. Ce procédé n'a subi que de légers changement depuis plus de trois siècles.
Les dentellières aimaient se rencontrer et bavarder quelque peu, pendant que les fuseaux sautillent sous les doigts agiles en émettant de petits cliquetis différents suivant la nature des bois dont ils sont faits : certains en hêtre, d'autres en merisier, prunier, acacia, exceptionnellement en ivoire ou corne.
Il est agréable d'être à l'air pour travailler
paisiblement et jouir de la pleine clarté.
Les dentellières avaient pour patron Saint-Louis, et chaque année le jour de la fête d'Arras, toutes venaient à l’église Saint-Jean-Baptiste, assister à la messe en l'honneur de leur saint patron. Elles portaient toutes un costume uniforme, il n'y avait aucune différence de classe : toutes, un bonnet à grands godets de dentelles, un jupon et un casaquin en basin blanc, un tablier de soie noire et également garni de dentelles.
Achicourt avait son école de dentelle
L'histoire des travaux d'aiguille est aussi ancienne que l'usage du lin, du chanvre et de la soie. D'après différentes informations locales, ce fut sous Charles Quint que l'on commença à fabriquer de la dentelle à Arras avec la grande part d'Achicourt, qui a su intimement développer son patrimoine local tout en étant tributaire de la ville d'Arras. Cette industrie - puisqu'il faut l'appeler par ce nom de rayonnement - prit naissance dans les couvents et dans les établissements de Charité fondés pour l'éducation des jeunes filles.
Au 17, siècle, sous la prélature de l'abbé de Saint-Vaast, Philippe de Caverel, fut fondée la maison des orphelines sous l'égide de Sainte-Agnès.En 1602, Suzanne Taisne, supérieure de Sainte-Agnès, obtint l'exemption des droits auxquels étaient assujettis tous ceux qui tenaient école. On trouve dans le privilège que la dentelle était la principale occupation des élèves.
Et nous retrouvons dans le règlement que Jeanne Biscot fit approuver par le magistrat en 1643 qu'il est dit que les religieuses s'engagent à apprendre à faire de la dentelle. En 1736 nous trouvons que la vente de la dentelle a produit la somme de 3641 livres 15 sols. Il y avait tant de petits doigts à la dentelle, que le travail fut centralisé par la Confrérie des « Lingers », tant le commerce était renommé. Aussi il fallut une Ordonnance du grand bailli et du magistrat en date du 23 janvier 1704, défend, sous peine de confiscation, aux marchands d'Arras et environs, d'étaler des dentelles sur la Petite-Place les jours du marché et les marchands de dentelle sont redevables d'une taxe annuelle envers le magistrat.